Christian est un père divorcé qui aime consacrer du temps à ses deux enfants. Conservateur apprécié d’un musée d’art contemporain, il fait aussi partie de ces gens qui roulent en voiture électrique et soutiennent les grandes causes humanitaires. Il prépare sa prochaine exposition, intitulée « The Square », autour d’une installation incitant les visiteurs à l’altruisme et leur rappelant leur devoir à l’égard de leurs prochains. Mais il est parfois difficile de vivre en accord avec ses valeurs : quand Christian se fait voler son téléphone portable, sa réaction ne l’honore guère… Au même moment, l’agence de communication du musée lance une campagne surprenante pour The Square : l’accueil est totalement inattendu et plonge Christian dans une crise existentielle.
Sacralisé au 70ème Festival de Cannes par la Palme d’Or, Ruben Östlund dresse un portrait satirique de la Suède, comme il avait pu faire précédemment avec maladresse dans Happy Sweden, mais aussi une remise en question totale de la société et/ou de soi, comme le merveilleux Snow Therapy qui avait été récompensé par le Prix du Jury à Cannes, dans la catégorie « Un Certain Regard».
The Square est une véritable expérience cinématographique, à vivre sur grand écran. Comme les précédents films du réalisateur, difficile d’imaginer un second visionnage tant le premier est subversif ; l’ambiance est à la fois intrigante et dérangeante, caractéristiques accentuées par des musiques aux tonalités presque « mystiques ». Ruben Östlund nous plonge au cœur d’une société où tous les maux semblent miroiter aux yeux de tous sans que quiconque s’en soucie. Le film se divise en deux parties : la première, d’un humour grinçant, installe presque « gentiment » les enjeux. Christian, le conservateur du musée joué par Claes Bang, déborde de charisme et jouit de son pouvoir avec une certaine forme d’honnêteté. Sa rencontre avec la journaliste incarnée par Elisabeth Moss est détonante, personnage totalement délirant et accélère le processus de crise existentielle que Christian va devoir surmonter. C’est alors que tout se renverse. Presque inconsciemment, notre position de spectateur tendait dans le voyeurisme, le réalisateur n’hésite pas à nous en faire subir les conséquences. Le retournement de situation est tel qu’un malaise énorme nous sévit et bouleverse notre position de spectateur, jusqu’ici passif, presque intouchable.
On ressort de The Square totalement ébranlé avec la sensation d’avoir été expulsé violemment de notre zone de confort. Le portrait que dresse Ruben Östlund de cette société qui va mal n’a rien de joyeux et pourtant, il est rare d’assister à un film aussi exaltant que celui-ci tout en captivant notre attention pendant presque 2h30. Palme d’Or amplement méritée !
(immanquable !)
Réalisé par : Ruben Östlund – avec Claes Bang, Elisabeth Moss
Date de sortie : 18 octobre 2017
Suède – Allemagne – Danemark – France – 2h22